mercredi 17 janvier 2024

La jeunesse d’aujourd’hui n'est pas l'avenir de demain…

La jeunesse est-elle vraiment l'avenir d'une communauté ? Voici une interrogation à laquelle une réponse évidente est loin d'être trouvée de par la difficulté rencontrée dans le saisissement de la notion <<jeunesse>> dont la nature est si complexe ; une interrogation couverte par la poussière séculaire des plus abondantes réflexions la concernant. Alors, afin de s'y prendre, la jeunesse, selon une conception commune incontestablement acceptée par tous, est une tranche de la vie se trouvant dans l’intervalle de l'enfance et de l’âge adulte, plus précisément entre 10 et 24 ans selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Au-delà de cette première conception, une seconde, parmi tant d’autres existantes, amène à considérer la jeunesse comme une organisation sociale des âges de la vie, un processus de construction longue qui vient en partie se superposer à celui des adultes. Laquelle plus extensible et épousée par la réalité politique, économique et sociale. Ce tour d'horizon, base de l’édifice de notre réflexion, s’imposera en fil directeur pour exposer les méandres de l’actuelle jeunesse haïtienne, structurer la place qu’elle devrait occuper dans la construction d'un avenir radieux pour Haïti, par la suite.

 

La jeunesse est partout considérée comme porteuse de changement positif. Ce changement qui, depuis des siècles, attisent les convoitises de chaque citoyen s'attarde à se matérialiser. Étant l'incarnation de la vitalité, de la vigueur et de la force, ces qualificatifs poussent à déverser une totale et infaillible confiance dans les jeunes. Toutefois, cette confiance n'est pas innocente. Elle fait reposer sur leurs épaules la responsabilité d'assurer un avenir décisif pour leur communauté.  Les jeunes ont la capacité d'apporter le changement dans une communauté, dans un pays et de faire de l’illusion une réalité.  C'est dans ce même spectre d’idées que Barack Obama, dans un discours, a fait la prééminence de la jeunesse comme étant les maîtres de demain. L'objection à une telle position risquerait de souiller le sublime blason qui ceint l'âge doré de la jeunesse. Vu les conditions dans lesquelles patauge l'existence de la jeunesse haïtienne de nos jours, les incertitudes prolifèrent quant à l'assurance d'un avenir prometteur pour la nation haïtienne. 

Il est inévitable plus que jamais que l'avenir d'Haïti bourgeonne dans les profondeurs d'un abîme dévastateur selon la pensée de plus d’uns et que, faire naître la confiance en cette jeunesse présente est le défi impossible auquel est prédisposé chaque esprit conscient. Ces incertitudes florissantes se dégagent d’une dévalorisation accrue de l'éducation aux yeux des jeunes en Haïti. Cette jeunesse, au contraire, s’adonne corps et âme à des expériences futiles qui la rendent inconsciente du devoir à accomplir. L’avenir d'un pays dépend grandement de l’orientation que se donne la jeunesse en raison de sa capacité de production et d’être détentrice des visions efficaces pour son pays. Les jeunes ont marqué les siècles par différentes réalisations telles que l'invention de Facebook en 2004 par Mark Zuckerberg âgé de 20 ans, l'invention de la machine à vapeur en 1769 par l'Écossais James Watt âgé de 33 ans, etc. Cependant, on reproche à celle d'Haïti son infertilité quant à la réalisation de tels succès. Les jeunes sont noyés dans la débauche orchestrée par la consommation des substances narcotiques comme le cannabis (bòz), de la chicha, et un ensemble d’activités malsaines, parfois horriblement réalisées dans l'enceinte des écoles et des universités, qui les dépouillent de leur humanité. Au lieu d'embrasser la danse de la connaissance, ils préfèrent embrasser celle de l’ignorance. Certes la dépravation de la jeunesse tient en majeur partie dans la complexité de ses mauvaises manières. Toutefois la responsabilité de l'État dans cette désorientation doit être hissée au mât de sa capacité à engendrer aisément son échec. La preuve de celui-ci se manifeste dans la faiblesse d'un système éducatif qui ne porte pas en elle-même les écailles d'une éducation citoyenne solide, ce qui d’ailleurs prédispose la jeunesse à la criminalité et à la beuverie. L'avenir de la jeunesse est malheureusement en ce sens hypothéqué par l’État et celui-ci l'a abandonnée au beau milieu d'un désert encore inconnu. 

La société haïtienne est majoritairement composée de jeunes, plus de 31% (entre 15 et 24 ans) selon les statistiques de l'IHSI et représentent largement plus de 60% (entre 15 et 64 ans) de la population haïtienne selon l’article <<la jeunesse haïtienne constitue une bombe démographique>>, Journal d'Haïti et des Amériques, publié sur le site rfi.fr le 21 décembre 2022.

En raison de ce chiffre, l'avenir de notre société devrait être garanti. Au contraire, l’incapacité pour les jeunes de se transformer en valeur vieillit l’espoir naissant qui s'affiche à peine à l'horizon. En outre, au lieu de se vêtir de l'armure d’une vraie sentinelle tenant la main d’Haïti pour le guider dans le droit chemin, la jeunesse se laisse chevaucher par des désirs pernicieux accouchés par la vénération excessive des fredaines qui les captivent.

De la sorte, la jeunesse n'est pas une période de la vie, elle est un état d’esprit.  En somme, la jeunesse doit nécessairement être habitée par un esprit jeune. Convient-il dans cette perspective d'analyser ici si la notion de jeune s’attache uniquement à la jeunesse. Il existe des jeunes vieux et des vieux jeunes. Toute la différence se trouve dans l'état d'esprit, animateur des différents âges de l'existence humaine. Appellerait-on jeunes ceux qui détiennent un esprit limité, restreint, et stérile face à l’innovation? Ou appellerait-on jeunes ceux qui, faisant abstention d'âge, ont un esprit éveillé, innovateur, ouvert? Les réponses à ces interrogations ne devraient être unanimes, elles entachent une grande part de subjectivité. Mais, celles les plus appropriées découleront nécessairement d'un esprit jeune doté de la capacité à entamer une solide réflexion précédée d’une nette compréhension des idées qui se dégagent à travers ces paragraphes.

La demande du rajeunissement du personnel de l’administration publique au sein de la société est accrue. Cela implique la substitution inconditionnelle des cadres ayant un âge avancé par des jeunes. Serait-ce la solution pour pallier aux problèmes incurables qui sévissent dans la société? Ne serait-ce que pour s'écarter de toute mystification et de miser sur une posture prophétique, une telle demande ne pourrait être justifiée et prouvée que par les résultats et les changements qu'apportera cette jeunesse haïtienne. En outre, la stratégie de la substitution serait difficilement concevable puisque l’administration publique depuis le démantèlement de la dictature du régime duvaliériste est sous la mainmise de certaines personnalités politiques qui se considèrent comme étant jeunes depuis lors jusqu’à nos jours. L’exemple d'une excellente extension de la notion de jeunesse! Malgré tout, l’État n’a jamais été au service de la société. L'essentiel, c'est de remanier les bases de la société haïtienne. C’est-à-dire favoriser la restructuration des institutions sociales majeures telles que la famille, l'église, l’école, et implanter ou du moins imposer aux jeunes une culture leur permettant d'endosser la responsabilité citoyenne. Il faut nécessairement éveiller l’intérêt de la jeunesse pour la politique par la cessation des pratiques mauvaises et corruptibles et, emprunter la voie de l’intégration des jeunes compétents dans la vie politique nationale c’est-à-dire les encourager à participer dans la gestion de la chose publique. L’encadrement de la jeunesse est une obligation essentielle et primordiale faute de quoi la jeunesse d’aujourd’hui n'est pas l’avenir de demain. 

 

En conclusion, il est important, à travers cette exercice, de vous demander si vous, vous êtes jeunes. Si la réponse est positive, au lieu de vous plaindre de la précarité de la situation qui frappe sans cesse à la porte de la société haïtienne et que tous vos rêves se canalisent vers l’extérieur, demandez-vous, ce que vous en tant que jeunes ayant une excellente vision, vous pouvez apporter de bénéfique à votre pays. Considérez-vous comme étant jeunes si vous en êtes incapables?

 

 

 Djouve Louis Gérald BATAILLE, STAFF COM-BDN 







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