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Bandits est une forme de
personnalité très présente dans la société haïtienne depuis quelques années. De
jours en jours, les troupes de bandits s'amplifient tout comme l'inquiétude des
civils face à la montée excessive du phénomène de la violence. Pour certains ,
ce fléau est une résultante politique liée à la complicité de l'international,
les armements, dont ils sont responsables. Mais de par cette allégation, ne
serait-il pas également une dérive engendrée par la société elle-même, porté
sur l'absence du sentiment d'appartenance social chez une catégorie de
personnes exclues? N'aurait-il pas d'autres éléments déclencheurs ayant rapport
à la vie sociale des individus? D'où la possibilité de jeter un coup d'œil sur
le phénomène du banditisme, autrement qu'avant, il est impérieux d'aller
analyser certains facteurs externes qui affectent le comportement d'un groupe
de gens, vu comme des déviants (I). Et de regarder s'ils ne sont pas aussi
victimes à un certain niveau (II).
I.- APPROCHES EXOGÈNES DÉTERMINANT LE BANDITISME:
Nul ne fait le mal
volontairement, affirme Socrate. De par ce constat, il paraît légitime de
parler des bandits en Haïti sur d'autres aspects. La violence n'est pas
seulement liée à la quantité d'armes à feu en circulation sur le territoire
national (A), elle résulte également d'un ensemble de faits sociaux ignorés(B).
A.- Situation
critique des gens au sein des quartiers populaires:
Depuis des
décennies, la population haïtienne se trouve en péril face à un système
d'insécurité qui sévit sur tout le territoire national manifesté sur plusieurs
formes: enlèvements, assassinats, vol, viol et autres... Mais face à ce fléau,
on accuse souvent un groupe de personnes venant des quartiers dénommés zones de
non-droits, habités majoritairement par des citoyens non éduqués, sans emploi,
sans sou. Ces gens-là sont souvent sujets d'un ensemble de préjudices liés à
leur zone de provenance, dits que quelqu'un est habité à Cité Soleil, Bel'Air,
Martissant et à Village de Dieu c'est de le nommer bandit automatiquement. Cette
qualification discriminante, parfois, sert de mobile à ces catégories de gens
pour pouvoir se rendre conforme à ces déclarations conjecturales. Nonobstant,
certains jeunes font la différence vis-à-vis de ces propos et s'exposent en
pleine scène, dignement tant en Haïti qu'au milieu extérieur. Mais ça n'empêche
que d'autres gens de cette même couche sociale se laissent emporter par les
méandres de la vie d'ici comme le vent remporte les fatras de la nature à la
mer, et finissent par se sentir rejeter du tissu social, par le fait qu'ils ont
été éloignés de la jouissance de toute privilège de la société et des droits
fondamentaux qui leur sont inhérents. Les quartiers populaires dits
"ghetto" n'ont pas d'établissements scolaires adéquats, les élèves
reçoivent une éducation au rabais, pas assez d'écoles professionnelles, ils
sont livrés à eux même. Ils entendent parler de l'Etat seulement à la radio et
remarquent sa présence lors des élections et avec les multiples opérations
policières menées à l'enceinte des bidonvilles. Comme ça la vie en communauté
s'estompe progressivement, certains sont des nantis et d'autres des démunis aux
yeux d'un seul État qui serait là pour défendre et garantir l'intérêt
collectif. D'une part, une frustration féroce est créée de façon automatique
chez les gens des quartiers défavorisés contre ses semblables. Au lieu de voir
les dirigeants comme le monstre, ce sont ceux qui ne partagent la même
condition de vie qu'eux-mêmes qui représentent la principale cible. Et à ce
moment ils se trouvent entre l'enclume et le marteau d'où le seul recours c'est
de venger leur sort face à la société pour dégager leur rancune, nourrie par le
mépris social. Sur ce fait, les hommes politiques dans leur pratique perverse
leur confèrent une légitimité gratuite dans leurs actes, pour les aider à gérer
leurs campagnes. Ils portent le nom de "Commandant; général; chef" et
passent pour les plus respectueux de la zone, inconsciemment les autres jeunes
qui partageaient la même condition de vie que ceux qui deviennent bandits, les
rejoignent tout comme les poussins poursuivent la poule.
B.- Les bandits sont aussi victimes du banditisme:
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La majorité des cas
de crime causés par certains des bandits sont incités par des substances
psycho-actives pour ne pas avoir toute leur lucidité au moment de la commission
du crime. De l'héroïne, de la cocaïne, de la marijuana sont parmi des
substances souvent consommées par les bandits, si on fait confiance aux dires
d'un ancien membre de gang opéré à cité-soleil, rendus à Ayibopost, et ce n'est
pas un secret pour personne qui suit attentivement le comportement des gens
violents et agressifs, qui consomment sans de la drogue. De nombreuses études
ont été menées pour montrer que la consommation abusive de la drogue mène à la
délinquance, en France une recherche conduite par Kensey et Cirba en 1980
démontre que 10,7 % des personnes incarcérées ont consommé une drogue au moins
deux fois par mois dans les trois derniers mois qui ont précédé leur
incarcération, voire Haïti d'où il y a aucun contrôle sur ce phénomène. Il n'y
a pas que les substances nocives pouvant pousser à endommager les biens et les
vies, les musiques faisant promotion pour la violence sont des pierres
angulaires dans l'instauration de la violence dans la société puisque les
artistes donnent déjà un caractère légitime à ces actes. C'est dans la
psychologie humaine d'extérioriser, de matérialiser ce que l'esprit consomme,
c'est ce qu'on appelle en psychologie le catharsis. Avec les
messages portés dans les clips musicaux, le phénomène de la violence
intensifie, surtout au niveau des quartiers populaires où il n'y pas des
mesures restrictives appropriées à l'écoute des musiques qui incitent la
violence et certaines fois qui se moquent du genre féminin.
Les bandits sont
devenus esclaves de leurs propres actions posées, quand ils deviennent reconnus
par la majorité de la population, ils sont obligés de restreindre leur liberté
tout seuls comme ils faisaient avant aux autres citoyens, qui ne pouvaient pas
circuler librement dans le souci de ne pas se faire enlever, violer, voler par
les gangs qui ont diverses méthodes opératoires. Ils se sont privés d'un droit
qu'ils nous ont privé également, ils aimeraient aller à Champs de Mars en plein
jour pour admirer les statues des héros de l'indépendance sur les places, de
monter dans les hauteurs de Pétion-ville, accompagnés des amis pour aller
palabrer sur la place de Saint-Pierre, d'aller au restaurant, visiter de
nouveaux endroits. Mais hélas, ils sont limités non seulement par la clameur
publique et les forces de l'ordre, mais également par d'autres troupes de
bandits qui opèrent dans les quartiers avoisinants qui veulent les tuer.
L'homme est le
produit de son milieu et est appelé à vivre éternellement dans un environnement
grégaire. Si les gens des quartiers populaires sont devenus aujourd'hui des
hommes dangereux c'est parce qu'on les a construits pour en devenir, déjà à
leur enfance ils symbolisent l'innocence. Ces déviants étaient à leur très
jeune âge le chouchou de leurs parents, de leurs voisins, de la communauté,
avant de se faire armé illégalement l'avenir du pays était reposé sur eux, les
plus âgés croyaient en eux même si aucun itinéraire n'a été tracé. Ça fait des
années, on a pourchassé, arrêté et même parfois, certains des bandits ont
trouvé la mort sur le champ de bataille, et on a compté beaucoup de cas pareils
pendant ces deux dernières décennies et malgré ça le maudit arbre continue à
donner fruits. Alors on aurait raison de déduire que la bataille ne devrait pas
mener contre les bandits mais le système établi. Le système établi c'est
l'existence de l'État qui n'est pas au service de la société, le système c'est
la conception sociale exclusive, le champ libre pour le mercantilisme
impitoyable, sans conscience. Un nouvel État avec une nouvelle jeunesse
consciente doit surgir pour mettre fin à ce fléau, car la solution implique la
participation de tout le monde, or déjà nous en sommes tous victimes du
système, en l'occurrence du
banditisme.
Nous ne
saurions penser que le sujet a été totalement analysé sur cet angle, relatif à
l'absence du sentiment d'appartenance sociale chez les gens des quartiers
populaires qui sont souvent mal vus et qui causent d'ennuis aux autres
citoyens. Comme se veut croire la logique, la science c'est la participation et
on est en droit d'avoir cru apporter notre pierre dans la construction d'un
champ de savoir rigoureux et d'encourager les autres à émettre des réflexions
sur des sujets multiples et d'intérêt général.
À noter que ce
texte a subi une légère modification en vue d'améliorer sa pertinence.
Écrit
par : Jean Fadens CHERON
Étudiant en Droit, lecteur.
STAFF COM-BDN